vendredi, août 20, 2010

Comment le cinéma rend meilleure la sociologie

Comment le cinéma rend meilleure la sociologie
Les noms, c'est pour les pierres tombales, mon pote !
Guy Hamilton, Vivre et laisser mourir, 1973.

Elle a ce tout petit supplément d’âme
Cet indéfinissable charme
Cette petite flamme
Michel berger, chantée par France Gall, Ella, elle a. 1987




Siegfried Kracauer Francfort-sur-le-Main, 1889-New York, 1966) est un journaliste, sociologue et critique de films allemand. Il aura été lié à Walter Benjamin, Theodor W. Adorno et Ernst Bloch. Il est une figure marquante de la gauche intellectuelle sous l'Allemagne de Weimar. En 1933, Kracauer s'exile à Paris puis en Amérique en 1941. sociologie du cinéma. L’ouvrage dont il est principalement question ici Théorie du film date de 1960. Dans cet ouvrage, il interroge les principes fondamentaux du cinéma jusque dans ses conditions matérielles. Il commence par interroger ce que peut être l’esthétique d’un médium.

Ouvrages traduits en français
De Caligari à Hitler : une histoire psychologique du cinéma allemand, L'Âge d'Homme, 1973
Les employés : aperçus de l'Allemagne nouvelle, 1929, Avinus, 2000
Jacques Offenbach ou Le secret du Second Empire, Le Promeneur-Gallimard, 1994
Le Roman policier : un traité philosophique, Payot, 1981
Rues de Berlin et d'ailleurs, Le Promeneur, 1995
Le voyage et la danse : figures de ville et vues de films, PUV, 1996
L'Histoire, des avant-dernières choses, Stock, 2006
L'Ornement de la masse, La Découverte, 2008
Théorie du film, Flammarion, 2010

Le principe esthétique fondamental
On peut partir de l’hypothèse que les réalisations propres à un médium particulier sont d’autant plus satisfaisantes au plan esthétique qu’elles mettent en œuvre les propriétés spécifiques de ce médium. […] Mettre ainsi l’accent sur les particularités d’un médium soulève cependant de sérieuses objections. L’une d’entre elles peut se formuler ainsi : les propriétés d’un médium défient toute définition concise. Il serait donc inadmissible de postuler de telles propriétés pour en faire le point de départ de l’analyse esthétique. On ne saurait déterminer à l’avance de façon dogmatique ce qui est adéquat à tel médium. Tout artiste révolutionnaire ne pourra que jeter à bas les spéculations échafaudées jusque-là sur la nature du médium dans lequel il travaille. L’expérience montre, en revanche, que tous les médiums ne font pas obstacle avec autant de vigueur.

Sigfried Kracauer classe historiquement différentes natures de médiums dans un spectre selon leur résistance à leur principe de définition esthétique fondamental. Cette résistance est liée aux phénomènes matériels et aux contraintes propres au médium. La peinture et la poésie offrent pour lui le plus de liberté ; le roman et le théâtre en offre mais ne peuvent subir tous les traitements. Enfin, pour lui, en 1960, la photographie est opposée à la peinture, car il n’existe pratiquement pas de genres hybrides dérivés de la photographie, la question de leur possible validité esthétique ne se pose pas.
Il faut de penser de la même manière que celle de son auteur historique la pensée de Siegfried Kracauer en l’historicisant, il n’est pas question ici de penser comme Pierre Bourdieu le fera plus tard aussi pour la photographie celle-ci comme un art en voie de développement. Si la question de l’hybridation des formes photographiques et cinématographiques sont largement interrogées depuis la parution de La théorie du film notamment par le multimédia et les jeux vidéo, la conception matérielle de ces médiums montre chez Sigfried Kracauer un intérêt dès son approche esthétique pour les conditions pratiques, techniques et le place dans une approche réaliste du proche de celle de Bazin.

Tout d’abord, que tel ou tel genre cinématographique reçoive un accueil favorable ne dépend de son adéquation au médium qu’il utilise. En fait, si de nombreux films relevant de genres spécifiques séduisent le public, c’est qu’ils répondent à des aspirations sociales et culturelles fort répandues. Leur popularité toujours confirmée tient à des raisons qui n’ont rien à voir avec la légitimité esthétique. […] Ce qui plaît au public séduit par l’adaptation cinématographique de Death of Salesman (Mort d’un commis voyageur), ce sont les mêmes qualités qui ont valu à cette pièce d’Arthur Miller un triomphe à Broadway, et il ne se souvie pas le moins du monde de savoir si elle a ou non quelque mérite cinématographique.
En second lieu, admettons un instant pour les besoins de l’argumentation que ma définition de la validité esthétique soit réellement unilatérale ; qu’elle traduise un parti pris en faveur d’un type de production cinématographique, important certes, mais particulier, et qu’elle n’a donc guère de chance de pouvoir prendre , disons, la possibilité des genres hybrides ou l’influence des composantes non photographiques du médium. […] Par une stricte analogie avec l’expression « approche photographique », l’approche d’un réalisateur sera qualifiée de « cinématographique » lorsqu’elle s’inspire du principe esthétique fondamental.

Cependant, les approches de Siegfried Kracauer et de André Bazin s’énoncent, sans se contredire, différemment quant à la finitude du cinéma. Dans Qu’est-ce que le cinéma ? Pour Bazin, le cinéma atteint sa complétude en étant l’art du réel. Avec le cinéma, l’homme est capable de recréer le monde à son image et atteint ainsi un rêve antique, un mythe, celui de vaincre le temps, autrement dit la mort. Il précise que cet espoir est illusoire et frustrant. Ici, il ne s’agira pas de d’être plus Baziniste que Bazin, mais on comprend mieux comment une époque en France s’est intéressée au cinéma. Et sans forcément les stars prendre comme Edgar Morin pour des déesses ou des dieux descendus incarner leur image une fois par an au Festival de Cannes, il est des plus juste de remarquer le rapport morbide de la star par les publics et le destin mortifère-vivant de Marilyn Monroe, James Dean auquel on pourrait rajouter Bruce Lee ou River Phoenix. Finalement, face aux angoisses de mort, l’art intrique avec des génies comme pourrait les décrire Norbert ÉLIAS et ceux-ci ont la capacité d’aller au-delà de leur fin : dans notre présent. De façon plus modeste, Sigfried Kracauer s’intéresse aussi à la star hollywoodienne dans théorie du film, mais de façon moins spectaculaire. On voit chez lui un plus grand intérêt pour l’entrée « public ». Pour Sigfried Kracauer, le cinéma ne se joue pas dans une finitude mais dans le flux de la vie qui relève de l’indéterminé ou plus exactement met en place une indétermination suggestive.

Le « flux de vie »
Il ressort de ce que nous venons de noter que la réalité qu’évoque un film vraiment cinématographique déborde l’image proprement dite qu’il en donne. Dans la mesure où les plans, dont il est construit sont porteurs de significations multiples, sa visée dépasse le monde matériel. A travers le flux ininterrompu des correspondances psychophysiques qu’il suscite, il laisse apercevoir une réalité que l’on peut à droit appeler « la vie ». Mais il s’agit ici de la vie en tant qu’elle est intimement liée, comme par un cordon ombilical, aux phénomènes matériels desquels émergent ses contenus affectifs et intellectuels. Or le film tend à saisir l’existant matériel en ce qu’il a d’illimité. On peut donc également affirmer qu’il a une affinité, évidemment refusée à la photographie, pour le continuum de la vie, ou « flux de vie », autrement dit, la vie sans début ni fin. La notion de « flux de vie » englobe à la fois des situations et des événements matériels et toutes les émotions, valeurs et pensées qu’ils suggèrent. Il s’ensuit que le flux de la vie est un continuum à dominante matérielle plutôt que mentale, même si par définition, il se déploie dans la dimension mentale. On pourrait même avancer l’idée que le film a une préférence pour la vie dans quotidienneté, hypothèse que vient étayer l’intérêt primordial du médium dans son immédiateté.





Exemple de traitement d’un objet par le flux de vie
Les intermèdes théâtraux intervenant dans des films par ailleurs réalistes assument une fonction cinématographique dans la mesure où, se plaçant à l’écart du flux de la vie, il s le mettent en relief. Paradoxalement, l’artificialité théâtrale, qui en principe va à contre-courant du médium, joue un rôle esthétiquement positif dès lors qu’elle est traitée à mettre en valeur le non-artificiel. Aussi, plus un numéro de théâtre placé en insert est stylisé, mieux il joue son rôle de repoussoir pour le caméra-réalité.

Pour Siegfried Kracauer, la question du cinéma n’est pas un espoir illusoire et frustrant de vaincre la mort, mais une situation, un événement matériels qui permet qui font se sentir plus dans la vie. En d’autres mots, pour l’homme en tous cas, la vie ne suffit pas à la vie. Car il nous faut avoir en tête les interrogations sur une possible immortalité de certains végétaux que nous avait rapportées Francis Hallé, biologiste et botaniste invité lors des leçons de l’université durant le Festival d’Avignon. Plus encore, par rapport aux végétaux, nous ne nous suffisons pas puisque nous sommes obligés de les manger car nous ne sommes pas capables de synthétiser la matière organique. A y regarder de plusieurs points de vue, il est clair que la vie ne suffit pas à la vie et que nous avons besoin d’artifice : le premier étant de manger du végétal, puisque nous ne sommes pas des légume, ni immortels, ni auto-suffisants. Nous avons besoin de nous rassembler et, comme le souligne Jean-Louis Fabiani discutant l’approche durkheimienne des rites, nous avons besoin de le faire d’une façon : selon une esthétique. Et de la même manière qu’un film vraiment cinématographique déborde l’image proprement dite qu’il en donne, aller au cinéma n’est pas seulement au cinéma. C’est y aller en groupe ou non, à tel endroit… La vie ne suffit pas à la vie, mais il y a des lieux, des événements, des situations où l’on est un plus près de la vie. Le philosophe François Flahault décrit le sentiment d’exister que procure l’acticité culturelle. Ce sentiment, lors de terrains, nous l’avons toujours rencontré à un moment ou un autre et nous l’avons cerné souvent comme un besoin d’être là : un sentiment de participer au flux de la vie.

Ce sentiment de participer au flux de la vie est toujours une performance de la vie et pour cela relèvent d’artifices. La rue et le cinéma sont des lieux clés pour Kracauer. Ainsi, la foule, l’intimité sont d’emblée des conditions matérielles importantes: dans la foule, oui. Mais avec qui ?. Le cinéma, donc, mais aussi les festivals, l’art. Il faut aussi rajouter l’alcool, la drogue, cinéma. Sans compter les stades, les études, les campus et le cinéma, Si le cinéma nous rapproche de la vie pour Kracauer, ces moment qui sont saturés de signes ou parfois complètement épurés sont propices à ce que John deewey appelle, dans Art as experience, l’expérience esthétique, ces accidents qui transforment notre vie et le regard que nous avons sur elle.

Ces moments qui ne sont pas exactement la vie, puisqu’ils l’excèdent, la décrivent mieux la vie. Et c’est pour cela qu’il faut méthodologiquement s’y intéresser. On peut alors poser la question simple pour un observateur vivant, qui ne se placerait pas au-dessus de la vie, de sa capacité à saisir ce qui excède la vie. Il faut être modeste, ne pas renoncer et transmettre . Albert Camus écrit qu’Il faut imaginer Sisyphe heureux. Paul Veyne que notre rapport à la musique ne peut s’expliquer jusqu’au bout car elle touche directement nos nerfs, mais il pour autant il ne prône pas l’arrêt de la connaissance. Il faut continuer à cette connaissance de l’indéterminé. Non pas de la futurologie, mais s’intéresser aux lieux de flous, d’indétermination sexuelle, de changements et de mobilité sociale, de conflits, de, d’expériences esthétiques, d’accidents, de maquillage…. Car c’est dans tous ces flous que pour le sociologue se loge ce que Prieto pourrait appeler des points d’analyse ou d’observation pertinents pour analyser une carrière. C’est dans le flou et le doute que l’être humain cherche, retrouve, créer, réinvente ses repères à partir de son expérience sociale pour en faire un trait intime. Emmanuel Ethis qualifie ces moments d’édifiants : ils sont à la fois intéressant pour le sociolgue qui apprend quelque chose du social et l’intéressé-intéressant apprend quelque chose de lui. On peut rajouter que c’est aussi le cas du sociologue.
Ce que Sigfried Kracauer permet de sortir de la question des angoisses de mort, de l’art et du chef-d’œuvre. Elle nous permet aussi d’une manière plus modeste d’interroger les pratiques culturelles ordinaires, celles qui nous rassemblent, de la soirée à la fête votive, du festival au campus, du canapé devant la télévision au hall d’hôtel et leurs toilettes. Tout d’abord, cette angoisse de la mort décrite par Philippe Ariès nous permet de mieux comprendre le sens de La reproduction décrite par Bourdieu. Comme avoir des enfants, la reproduction du sociale et culturelle, c’est aller dans quelque chose avant soi et qui doit pouvoir aller après soi : déborder une vie qui ne se suffit pas à elle-même. Cette angoisse vitale de la mort a pour objectif la reproduction et la transmission Par ces pratiques culturelles, ordinaires c’est être transmis et transmettre sans être Mozart, sans être une star… Ensuite, Siegfried Kracauer nous permet d’appréhender une fonction de réajustement social que prennent certains lieux intermédiaires et comment des lieux dits fonctionnels comme les halls d’hôtels servent dans le roman policier à décrire une modernité et que ces espaces d’inutilité fonctionnent comme des gares de triage impersonnelles où personne ne vous accueille mais comme dans le système du panoptique : tout le monde accueille tout le monde et se joue un théâtre de la présentation et de la représentation. C’est parce que la vie ne suffit pas à la vie que nous avons sans cesse besoin de ces espaces de réajustement. C’est par la création de ces espaces de transition – semi-privé, semi-public - que nous civilisons entre nous et les autres.

La raison humaine n’est pas encore suffisamment exercée ; la civilisation des peuples n’est pas encore terminée ; des obstacles sans nombre se sont opposés jusqu’ici aux progrès des connaissances utiles, dont la marche peut seule contribuer à perfectionner nos gouvernements. Nos lois, notre éducation, nos institutions et nos mœurs.

Siegfried Kracauer pointe en conclusion la participation du cinéma à la civilisation qui donné un point de vue original sur la culture de masse ou populaire :

Parmi les représentations que véhicule le cinéma, il en est une qui mérite une mention spéciale du fait qu’elle exprime un rapprochement réel entre les peuples du monde et œuvre à le renforce. Comme il est logique, Eric Auerbach y fait allusion après fait observer que les hasards de décrits par le roman moderne portent sue « ce que les hommes ont de commun et d’élémentaire ». « Dans ce type de représentation exploratoire et libre de préjugés, poursuit-il, on doit bien voir à quel point-en deçà des conflits qui déchirent l’humanité- les différences entre les formes de vie et les manières de penser des hommes se sont estompées. […] Au-dessous des conflits, et aussi à travers eux, se poursuit un processus d’égalisation aussi bien économique que culturel. Il faudra bien du temps encore jusqu’à ce que l’humanité vive une vie commune sur la Terre, mais déjà le terme commence à être visible.



Siegfried Kracauer, Théorie du film. La rédemption de la réalité matérielle, Bibliothèque des savoirs, Flammarion, Paris, 2010, pp 40-41.
Siegfried Kracauer, Théorie du film. La rédemption de la réalité matérielle, Bibliothèque des savoirs, Flammarion, Paris, 2010, pp 75-76.
André Bazin, Uu’est-ce que le cinéma ? Editions du Cerf, Paris, 1985, 372 pages.
Edgar Morin, Les Stars, Seuil, coll. « Points », Paris, 1972, 183 pages.
Siegfried Kracauer, Théorie du film. La rédemption de la réalité matérielle, Bibliothèque des savoirs, Flammarion, Paris, 2010, pp 122-123.
Siegfried Kracauer, Théorie du film. La rédemption de la réalité matérielle, Bibliothèque des savoirs, Flammarion, Paris, 2010, p 125.
Norbert Elias, La civilisation des mœurs, Paris, Calmann Levy, 2006, p 101.

mardi, août 17, 2010

Supers héros à l'université : Captain America dopé, Thor bourré... C'est du vilain tout ça !








Supers héros à l'université : Captain America dopé, Thor bourré...
C'est du vilain tout ça !


Rédigé par Mario, le mardi 17 août 2010 à 14h04
Quelques auteurs de comics et scénaristes de séries TV ont tenté d'imaginer comment auraient pu être les supers héros lorsqu'ils étaient à l'université. Bien évidemment pas question d'entacher la réputation d'un Superman, d'un Flash ou d'un Thor.


Mais soyons sérieux, c'est bien à l'université que l'on teste le plus de choses, que l'on fait le plus de bêtises et n'oublions pas l'effet des confréries et de la vie sur le campus. Et imaginons maintenant qu'une université des supers héros ait existé... mais attention pas dans le genre école pour surdoués de Xavier, plutôt dans le genre Sentai school.


Nous avons des preuves en images avec une série de vignettes représentant le professeur Xavier en train de faire une proposition indécente, un Thor sortant d'un bar torché, un Superman pleurant sa Lois, ou encore un article de Lois et Clark sur une affaire de dopage concernant Captain America et son équipe de football américain.


De quoi prouver, si c'était encore nécessaire, que les super héros sont bien de mauvais exemples pour la jeunesse. Vous pourrez retrouver, tout cela en image et bien plus encore (on n'allez pas tout révéler tout de même parce que c'est pas joli joli ce qui se passe dans cette université) dans l'article Comic Book University de College humor.